04h30
Les moustiques ont eu raison de mon sommeil. Les anciennes moustiquaires accrochées par des scratchs sur les fenêtres n'ont pas été ajustées sur le système d'air conditionné, et les moustiques peuvent rentrer. Peu importe.
Ceci n'attaquera pas ma bonne humeur, procurée par une excellente journée...
A 8h, nous étions dans la rue, partis à la recherche du fameux restaurant, que nous trouvâmes après 10 minutes de marche. Nous comprenons que les premier service, pendant lequel ils servent les dosa, est terminé. Désormais, il faudra attendre 9h00 pour la réouverture.
Nous continuons donc notre chemin. A cette heure de la matinée, le trafic est encore tranquille, la plupart des magasins sont encore fermés, seules quelques échoppes alimentaires sont déjà ouvertes. Surtout, la lumière a une clarté qui n'est pas encore écrasée par la chaleur, alors même qu'une sorte de halo la rend plus diffuse. Nous découvrons un quartier sans touristes, et du coup, nous respirons.
Nous fixons de nombreuses images : matières de murs, affiches, personnages, scènes de rue. Un vrai régal pour les yeux. Quand nous revenons, nous pouvons passer à table. On nous sert, plus que nous commandons, des utapams, une sorte de galette blanche assez épaisse, accompagnée d'un oeuf masala. La sauce dans laquelle baigne l'oeuf dur est suffisamment épicée pour que les enfants la laissent de coté. C'est vraiment bon. On mange avec la main, bien sur. Et nous assistons au ballet d'un cuisinier qui prépare la pate des parothas, qui sont d'autres galettes. Ca ressemble un peu au geste du pizzaïolo. Quelques minutes suffiront pour ce petit déjeuner tonique, ce qui nous change des temps d'attente interminables dans les restaurants touristiques que nous avons fréquentés à Varkala et à Cochin.
Nous reprenons donc notre exploration du quartier et nous sommes bientôt arrêtés par un couple de personnes agées. Le sourire que la femme adresse à Hortense est désarmant de tendresse. Son mari nous explique que ses deux garçons vivent et travaillent à Doha, si bien qu'ils ne voient jamais leurs petits enfants. Aussi les trouvons nous dans une situation de "manque caractérisé". Je ne cache pas mon plaisir à répondre à leur invitation à venir prendre le thé chez eux. Dieu merci, les enfants ne renâclent pas.
Ils habitent une vieille maison à l'architecture traditionnelle du Kerala, que nous prenons le soin de visiter partiellement. Cette maison fait l'objet d'un différend qui les oppose quotidiennement à ce qu'il semble : elle voudrait la raser pour en construire une neuve; il préférerait garder sa vieille maison. Personnellement, je fais valoir qu'elle a un charme et une authenticité qui lui donnent une valeur qu'une maison neuve ne pourra avoir, surtout avec ce que l'on voit ici. Je ne crois pas les avoir convaincu. Mais je suis certain que cette situation se produit fréquemment, et que le mobilier, comme certaines parties de la maison, les portes ou des piliers en bois notamment, doivent se retrouver sur le marché de l'occasion ou dans la cheminée...
Nous passons ensuite en revue les plantes du jardin, dont plusieurs sont renommées pour leur vertu médicinale ou culinaire. Pour finir, nous découvrons que pour tromper leur ennui, ils font de la cuisine à la demande ! Un autre motif, s'il en fallait, pour leur rendre visite bientôt.
(5h20, Les mosquées résonnent du premier appel à la prière.)
Nous terminons notre balade par la promenade du bord de mer, en plein coeur du quartier touristique, au nord ouest de la vieille ville. Les beaux hôtels dans de vieilles demeures coloniales, les carrelets qui ramènent du poisson, le chenal d'entrée pour le port industriel d'Ernakulam...
Après ces 5 heures passées en vadrouille, il est temps de rentrer pour échapper au soleil et à la température qui a franchement grimpée. Nos estomacs criant famine, je resors avec Edgar pour acheter quelques samosas, un ananas, un kilo de grenades et un beau paquet de nougats que nous dégustons avant de profiter d'une sieste bien méritée. Pour achever cette journée, Séverine nous embarque au Cochin Cultural Center pour assister à une représentation de Katakali.
Nous avons la chance d'arriver les premiers, et bien en avance, ce qui nous permet d'obtenir des places au second rang, qui étaient auparavant réservées. Les deux danseurs sont déjà sur scène en train de se maquiller. Cette préparation est généralement publique et nous profitons de ces moments de paix et de silence, seuls avec les danseurs, qui nous acceptent bien volontiers. Ce maquillage équivaut à un rituel du fait de sa répétition et de la relation qu'entretient cette danse avec les dieux.
AU bout d'une heure et demie, le spectacle peut commencer. On assiste en premier lieu à une sorte d'initiation au langage de cette danse. On comprend que les mouvements des yeux, du cou, du buste et des mains constituent un langage complet qui permet de retracer des histoires. C'est l'une d'entre elles qui nous est proposée, ensuite. Dire que nous comprenons serait absolument exagéré. Même si nous imaginons la trame d'une situation, nous restons totalement hermétiques au sens des mouvements de la danse. J'espère que nous aurons l'occasion d'y revenir; pour une autre histoire...
06h00, je vais essayer de me rendormir un peu avant la dure journee aui s'annonce : aujourd'hui, on part explorer les vieilles rues d'Ernakulam