mardi 12 février 2008

120208 – Bangalore

Nous pensions prendre un bon train de nuit pour être demain matin à Ernakulam / Kochi, afin de récupérer les bagages laissés là-bas. Finalement, les trains sont complets ce soir et demain soir. Nous partons donc pour douze de bus « sleeper ». A priori, on se prend à espèrer un car confort deluxe, mais comme il faut s'attendre à tout, je préfère imaginer que nous aurons à supporter un voyage difficile.

Les transports commencent à devenir difficile, tant nous sommes chargés. Nous devons impérativement trouver une balance pour ne pas avoir de mauvaise surprise à l'aéroport. EN attendant, Varkala nous tend les bras. La haute saison étant derrière nous, la falaise devrait être un peu plus calme. Nous allons loger chez Jayan et Jocya, avec lesquels nous pensons passer une semaine tranquille.

Derniers jours, derniers couchers de soleil, derniers currys, derniers ...

En déroulant la bobine du film de ce voyage, je savoure le nombre de moments forts qui l'ont ponctué. Tant d'images, de saveurs, de couleurs et autres sensations qui m'ont habité, et que j'ai essayé, au travers de ces quelques notes prises au quotidien, de préserver.

Il est peut être encore tôt pour émettre les conclusions, cependant, je sais par avance que notre discours se réduira à quelques phrases tôt lancées, et presqu'aussitôt répétées ou oubliées. De fait, nous aurons sans doute à coeur de remettre pied dans la réalité et celle-ci nous rattrapera, de même que l'Inde nous a absorbés sans coup férir pendant ces neuf semaines.

Varkala se prêtera parfaitement à cet excercice, dans la mesure ou nous finirons notre séjour là où il a commencé. Les différences de sensations, d'exigences et d'intensité seront autant de repères propres à me montrer le chemin parcouru.

Pour l'instant, nous ne pensons qu'à quitter Bangalore. En dehors de Magali chez qui nous aurons passé deux journées tranquilles, la ville en elle-même ne nous aura pas séduite. Nous n'en avions ni l'envie ni le temps à lui consacrer. C'était par avance une étape entre deux séjours, entre Hampi et Varkala.

L'environnement minéral et sauvage d'Hampi fut une réelle découverte. En d'autres termes, je ne m'y attendais pas. Là-bas, j'ai rencontré des personnes éprises de nature, connaissant sur le bout des doigts la faune et la flore indienne, vantant sa richesse et sa variété. Que ce soit ce jeune indien passionné par les ours, qui parcourt l'Inde pour sauver les ours de foire. La soirée que nous passâmes en sa compagnie chez le maître des lieux fut édifiante tant la fougue qui l'animait nous emmenait dans la visite d'une Inde presque mythique : celle des tigres, des crocodiles, des léopards, des ours et des oiseaux. Que ce soit ces producteurs de la BBC, so british, venant au Boulders pour rencontrer cet homme et pour explorer le potentiel de ces territoires en termes de création de reportage. Que ce soit ce jeune photographe de Bangalore, dont les clichés ont abondé ces thêmes d'une nature finalement préservée. Dans ces parages montagneux, les pâtres qui emmènent leurs troupeaux de chèvres connaissent les cailloux par coeur. On les voit au détour des crêtes découpées, fondus dans le relief en ebouli de ces massifs, puis on les redécouvre au détour d'une petite rivière. Et, à la fin du jour, alors que nous sommes paisiblement installés sur une colline ou devant les rizières, on entend les clochettes et les cris des pâtres qui s'empressent de rentrer au village.

Ce week-end, les promenades que nous fîmes sur les pas de Magali, nous entraînèrent sur des sentiers rendus encore plus insolites par la variété des espèces que j'y croisai : perroquets, aigles, chouette royale, monitor, grenouilles, essaim d'abeilles en reconstitution, singes, macaques, nuages de libellules.


Plus encore, je reste ébahi par les formes étonnantes des rochers. A tort ou à raison, je n'ai cessé de pensé aux itinéraires chantés des arborigènes australiens. L'histoire de cette cosmogonie est très belle : elle raconte le destin de ces dieux, qui en se réveillant, se sont mis à arpenter le monde et à le nommer. Puis, une fois leur vie passée, ils se sont rendormis, laissant aux hommes le soin d'entretenir le monde en leur confiant ces chants. Ainsi, chaque homme qui naît se voit attribué une portion d'itinéraire. Des milliers de « songlines » traversent l'Australie, se croisent, et s'entrelacent. Tout le territoire est ainsi jalonné de poésies chantées par ces hommes et femmes, pétris par la nature. Ce que j'ai vu à Hampi, notamment à travers le regard amoureux que porte Magali à ces pierres, ce sont des formes qui jaillissent partout et nulle part, comme ces itinéraires chantés, qui racontent le monde en le nommant.


Le lac du visage couché

La vallée de l'hyppopothame

La colline du pouce levé

La rivière des coeurs

Et tant d'autres


Et voilà que le temps presse

La maisonnée va bientôt se remplir du cri des enfants

Les sacs sont prêts, entassés devant la porte

Nous allons commander un taxi

Demain matin, si dieu le veut, nous serons à Fort Kochi pour prendre le chaï

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