Fort Kochi – Dimanche 6 janvier
17h10
La journée s'étire en longueur. Les fans suffisent à peine à nous apporter un semblant de fraîcheur. Hortense et Théodore dessinent des mandalas, Edgar s'essaie laborieusement à la rédaction de son carnet de voyage, Séverine termine « L'histoire de Pi », un enfant qui passe 247 jours sur un radeau de survie en compagnie d'un tigre. Quant à moi, je pianote sur le clavier de mon portable.
On ne peut pas se prendre d'affection pour un ordinateur. Les autocollants se sont amassés sur mon « vieux » Satellite Pro A60 depuis Bali (3 ans). Cependant, compte tenu des signes de faiblesse, et malgré une réinstallation complète du système avant notre départ, je commence à douter de lui et à faire des sauvegardes régulièrement. On ne pourra plus parler de ce compagnon de voyage comme il est fait mention de la machine à écrire verte Olivetti, modèle portable « Lettera22 », de Bruce Chatwin dans la préface à ses oeuvres complètes. Certains exégètes parleront avec la même émotion de celle d'Hémingway, ou d'autres écrivains. La vie d'un ordinateur est trop brève, son fonctionnement lui-même est par trop associé à la dégénérescence des logiciels. Il existe pourtant quelques modèles de portables tout terrains, dédiés aux professionnels du batiment notamment. Mais si la carrosserie est belle et résistante comme celle d'un Land Rover Defender, il reste que la panacée n'a pas encore été trouvée pour que le système d'exploitation soit à l'abri de son auto-dégénérescence.
Qu'on s'entende bien, l'habit ne fait pas le moine. Il s'agit simplement d'une observation, récurrente, de la généralisation du périssable... au détriment de certains objets sur lesquels on pouvait cristaliser certains souvenirs, pour le moins.
... restent les carnets Moleskine. Ils furent les compagnons de nombreux artistes et écrivains, dont Chatwin ou Hemingway. Ils sont diffusés à peu près partout (même chez Cultura) par la maison italienne, Modo & Modo. Le mien vient d'une papeterie proche du Rockerfeller Center. Les premières pages sont parsemées d'annotations, adresses et autres observations prises lors de notre passage à New York au début du printemps. Son format lui permet de toujours rester dans ma poche, à portée de mains; un ruban assure une ouverture à la page en cours et l'élastique qui l'entoure empêche les tickets (ferrys, trains, musées), les fleurs ou cartes de visites de tomber à la moindre secousse.
A propos du Defender, nous avons croisé ce matin une famille belge (4 enfants) qui semble avoir parcouru une bonne partie de l'Afrique, du Moyen-Orient, traversé l'Iran pour arriver en Inde. La vision de ce véhicule, rendu à sa première vocation, avec sa remorque, a suscité dans nos petits yeux le désir d'un rêve. Des coffres arrimés sur le toit renferment des tentes, indispensables pour les campements en Afrique, afin de se protéger de la faune. Il semble qu'ils soient partis pour deux années, avec autant de devoirs dans leurs bagages, sachant que le plus jeune n'avait qu'un an et demi, au départ. On regrette déjà de ne pas les avoir rencontrés pour leur poser mille et une questions sur un périple aussi magnifique.
Pour approfondir : http://www.la-vie-est-belle.be
Nos promenades se poursuivent. Nous sommes maintenant familiers des quartiers de Fort Kochi et de Mattancherry. Désormais, Jew Town, Palace Road, River Road, Princess Street, Burgher Street, the beach, Church Road, et surtout Bazar Road, forment la trame de mon imaginaire quotidien. Nous sommes désormais fixés sur notre prochaine étape : Calicut et sa région. J'aurais l'occasion de revenir sur cette ville dont la première richesse, développée par les portuguais, consista dans la production de coton. Nous devrions notamment pouvoir visiter des fabriques de coton, et surtout, un chantier naval traditionnel. Nous renonçons dans l'immédiat aux stations climatiques d'Ooty et de Munnar, proches des parcs nationaux et au coeur des grandes plantations de thé. Outre le fait que je ne suis pas très attiré par l'air frais des montagnes (la température peut descendre sous les 5°C la nuit), je ne nous vois pas non plus arpenter la campagne à pied alors que je passe déjà mon temps à porter Hortense pour de petites distances. En fait, nous avons encore envie de rester à proximité de la côte avant de bifurquer vers l'intérieur des terres, en direction de Mysore, pour une quinzaine, puis Bangalore et Hampi.
Demain matin, direction Bazar Road. C'est sans doute la rue que je préfère. Elle borde à l'est la presqu'île de Fort Kochi, laissant au sud le Dutch Palace et Jew Town, pour rejoindre au nord l'embarcadère pour le ferry, River Road, la plage et ses carrelets. Tout au long de cette rue se succèdent des échoppes de négociants en thé, épices, et autres biens manufacturés nécessaires au conditionnement et à la manipulation de ces denrées. On y croise des porteurs, des camions, les inévitables rickshaws, et toute une faune d'acheteurs et de négociants qui en font un endroit des plus animés, riche de bruits et de couleurs. Ce qui rend cet endroit encore plus séduisant réside dans l'architecture de ses batiments : ce sont d'anciennes manufactures, de longues et hautes batisses, le plus souvent dans un état de délabrement avancé. Certains ont eu une fonction d'habitation, et pour échapper à l'encombrement de la rue, au premier étage des couloirs ajourés de persiennes semblent encore cacher des vies au parfum épicé. Nous avons pu visiter deux de ces habitations, restaurées et transformées en galeries d'art. Je ne m'étendrais pas sur le contenu, qui ne nous a pas convaincu, sauf pour la Kashi Art Gallery, seul véritable lieu d'art contemporain de la ville. Sinon, rien, nada, zéro... Toujours est-il que nous avons pu apprécié ces longues pièces, hautes de plafond au rez-de-chaussée, beaucoup plus qu'à l'étage en tout cas, dont les sols ressemblent à un béton ciré, toujours de couleur brique. Les murs, très épais, sont recouverts d'une sorte de chaux, afin de les laisser respirer l'humidité, très importante au moment de la mousson (de juin à fin octobre). On se dit que ce patrimoine de caractère, s'il peut encore résister quelques années finira bien par attirer l'oeil des investisseurs pour être transformé en hâvre de paix, de calme et de luxe sans doute. Je ne parlerais pas, pour paraphraser Baudelaire, de la volupté, dont on a déjà assez dit combien elle est étrangère au quotidien de ce pays. Ainsi, j'ai appris qu'un des plus beaux batiments venait d'être racheté par un fonds d'investissemnts de Dubaï, pour un million d'euros, afin d'offrir une nouvelle étape de luxe dans la région. Et l'on repense à l'engouement des européens pour les riads de Marakkech.
5 commentaires:
Et bien le moins que l'on puisse dire c'est que vous nous donnez une grosse envie de voyager...On vous souhaite une très belle année 2008 et avons hâte de vous voir.
On vous embrasse.
Greg&Manue&Valentine.
Nous vous souhaitons une belle et bonne année.BISOUS
Impressionnant le site de nos amis Belges!!!
Nous ici, on voyage un peu aussi. Notre quotidien s'allège grâce aux couvertures de presse aussi légères qu'expressives: légèreté, amour…des valeurs qui nous parlent.
On se fout même de la gueule des Ricains avec une culotte qui dépasse…Mais pas de répression pour la belle Carla, notre belle et future première dame sera juste privée de visite chez les Saoudiens, mariage trop tardif.
Bolloré...oh oh, Carlaé...oh oh oh oh!!!
Aller, merci de nous sortir demain du quotidien.
Ciao.
Merci, de nous permettre de vous accompagner. La description de vos sensations me font voyager, C bon et ça me donne très envie de reprendre mon sac à dos... YAKA!!!
Je vous envie et vous embrasse.
Jean-René
Cela fait 3 jours que nous n'avons pas de "nouvelles neuves" sur votre carnet de bord, on ne peut plus voyager ! Vous faites du teasing ? :)
A très bientôt
Géraud et AS
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